Agir
Synthèse de l’article de J.-S. Decaux publié dans l’ouvrage collectif dirigé par G. Légeret « En finir avec les idées fausses sur l’artisanat et les métiers manuels »
Septembre 2025
T&F Investissement
Les métiers manuels et l'industrie manufacturière joueront un rôle essentiel pour le redéploiement de l'outil productif dans les territoires. Ils réclameront pour cela des investissements qui ne se cantonneront pas aux données économiques, mais qui prendront en considération l'ensemble des écosystèmes, y compris la dimension socioculturelle des savoir-faire. Cela présuppose un changement de regard sur le travail de la main, comme le montre très justement l'ouvrage collectif édité par Gabrielle Légeret, fondatrice de l'association De l'or dans les mains qui sensibilise les jeunes collégiens aux métiers manuels.
Les investisseurs prennent encore peu en considération les singularités des modèles industriels territorialisés en France, notamment leur dimension socioculturelle. Si le plan French Touch lancé par la BPI constitue un premier jalon, le chemin est encore long et semé d’embûches. « Etant peu lisible, cette dimension ne donne pas lieu aujourd’hui à une stratégie de réancrage de la production claire et marquée, adaptée aux spécificités territoriales, et au déploiement de dispositifs au service d’une visée politique contribuant à la souveraineté industrielle ».
Or, la prise en considération de cette dimension socioculturelle permet d’identifier et de distinguer les projets entrepreneuriaux qui visent à revitaliser les savoir-faire d’un territoire. Pour Terre & Fils Investissement, cette démarche s’appuie sur une lecture transverse, qui envisage à la fois la géographie du bassin de vie, l’histoire des gestes et l’intégration des savoir-faire dans la culture locale. « Cette production du patrimoine vivant, née de l’interaction dynamique entre l’humain et son milieu, permet de faire naître des écosystèmes territoriaux singuliers », qui réclament un accompagnement spécifique ne se limitant pas à la valeur économique des projets.
Le principal défi de la recréation de l’outil productif et des filières est la pérennisation de ces modèles à fort impact territorial. L’investissement doit donc être envisagé sur le temps long, avec des rendements modérés. Réactiver un savoir-faire ne se fait pas du jour au lendemain !
La coopération entre les différents acteurs constituera une des conditions de réussite : les investisseurs et les entrepreneurs seront amenés à embrasser une vision globale, afin d’intégrer les enjeux économiques dans une perspective plus large qui prenne en compte, par exemple, l’initiation aux métiers manuels, le développement de nouvelles formations, l’articulation entre les savoir-faire et la technologie, etc. Ces démarches devront être soutenues par une forte volonté politique de différencier les projets patrimoniaux, au-delà du secteur du luxe. À ce titre, le rôle des collectivités sera essentiel. « Ces nouvelles formes de coopération sont fondamentales pour contribuer à la résilience territoriale et replacer l’outil productif au service de la fortification d’une culture partagée ».
« En finir avec les idées fausses sur les métiers manuels et l’artisanat », éd. G. Légeret aux éditions de l’Atelier